Suntrip Alpes 23

C’est un rallye-aventure à vélo solaire, 35 participants, parcours libre entre les villes-étapes, pas d’assistance personnelle autorisée, donc une certaine autonomie nécessaire pour les petits soucis, et une équipe de soutien pour les plus grosses galères si cela devait arriver.

Comme les départ et arrivée sont assez proches de Neuchâtel, il était logique d’y aller directement avec l’attelage de voyage, par la route. Ce qui pousse le kilométrage sensiblement au-delà de la barre des 3’000 km

La page officielle est ici: https://www.thesuntrip.com/sun-trip-alpes-2023-presentation/

Mon choix a été d’avoir un ensemble orienté vers le confort et l’efficacité, avec un couchage hors-sol et facile à gérer en cas de pluie. Simplement parce que je peux le faire, et que secouer ma tente chaque matin ne m’enchante plus du tout. C’est une décision personnelle, pas une recommandation ou une critique; les autres participants semblent avoir bien vécu les nuits sous tente. J’avais juste envie d’autre chose.

Dormir dans une structure en dur implique de la transporter, donc il a fallu concevoir le tout. Plusieurs projets ont été faits en 3D et en maquette, mais au final ce sont des partenaires issus des bateaux qui ont trouvé la bonne solution avec une coque de type coquillage permettant une bonne aéro et une masse réduite. J’y ai ajouté le solaire, les roues et timon, les régulateurs de charge, convertisseurs USB, feux, loquets, prises, et plein de petites choses diverses et variées et c’est devenu une remorque de camping.

Un avantage est de pouvoir s’arrêter dormir sur un peu n’importe quelle surface, y compris en environnement urbain.

Le temps de passage de conduite à position couchée est de l’ordre de 8 minutes, et environ 10 minutes dans l’autre sens. On peut même compresser cela pour réduire le temps dehors en cas de pluie…

Avec de l’espace à bord (83 x 200 cm tout de même) il est prévu de garder ses valeurs avec soi durant la nuit. possible aussi de travailler, regarder un film. Des ancrages pour téléphone, tablette et casque sont prévus. L’avantage d’être bien à l’abri sous un toit en dur.

Sur la ligne de départ. On voit que l’ensemble roulant est très fin, permettant une bonne pénétration dans l’air. La faible hauteur de la remorque la rend efficace en courbes, je ne la sens quasi pas en descente de cols.

La fonction « bureau mobile » de la remorque est très pratique, que ce soit par un soleil de plomb ou sous la pluie d’ailleurs.

Pause recharge dans le Télégraphe, histoire de capitaliser sur les heures de forte puissance et ainsi pouvoir rouler plus vite et avec plus d’assistance. Cela permet aussi de faire une belle pause à mi-journée et repartir plus reposé pour la seconde partie.

Au gré des kilomètres, on se retrouve parfois avec d’autres Suntrippers pour partager un bout de chemin.

Impressionnant, la route à flanc de coteau avec des centaines de mètres de vide juste à-côté des roues… C’est le moment de rester concentré et de tout faire bien.

Bon, de la neige au début de l’été, ça fait toujours son petit effet. Là je pense aux collègues sans carénage, et m’amuse à les voir s’arrêter pour remettre une veste, des gants, un pantalon… La température peut baisser de 20 degrés en quelques dizaines de minutes.

La montée double Télégraphe et Galibier est une douce folie. Voir ce que l’on vient de grimper est un plaisir immense à chaque fois.

Avec la fin de la végétation, le climat change plus rapidement, le vent prend ses aises, on sent bien les changements sur ces terres aussi magnifiques qu’inhospitalières.

Le col et ses 2642 m

C’est à couper le souffle vu d’ici

Pour revenir à la technique, mon attelage est monté sans faiblir, avec une large réserve de température, aucun paramètre n’est arrivé à la limite. C’est absolument impressionnant lorsque l’on pense que des voitures étaient encore fréquemment en panne dans de tels cols il y a 25 ans à peine. Et de nos jours, il n’est pas rare d’avoir de très mauvaises odeurs de freins, pneus, embrayages sur les grands cols. Le matériel est mis à rude épreuve, mais mon attelage léger a beaucoup moins de contraintes et l’excellent rendement de la propulsion électrique limite fortement les risques de surchauffe. Le Galibier est passé avec 62°C de température maximale, alors que le début de la réduction de puissance est à 90°C donc il y avait une marge confortable.

Le ruban de goudron qui ondule sur la roche, de toute beauté

En montagne, soit cela monte, soit cela descend. Il y a donc largement de quoi récupérer de l’énergie avec les moteurs qui passent en génératrices. Je n’ai pour ainsi dire pas touché aux freins car le ralentissement électrique était suffisant, seuls les frottements divers (air, pneus, roulements, magnétisme) sont à compter dans les pertes. De cette manière, la récupération d’énergie a permis d’augmenter l’autonomie de 65.8 % sur ce trajet !

Depuis le point culminant de la plus haute route d’Europe, vue direction Nice. C’est donc le col de la Bonnette.

Et la vue direction Jonzier.

Parmi les moments mémorables, les nombreuses marmottes peu farouches se sont fait une belle place.

Du haut du col de la Bonnette jusqu’à Nice, c’est plus de 100 km d’une longue descente, idéal pour recharger les batteries.

3 clients en trikes avec qui j’ai roulé une bonne partie du voyage. De manière réjouissante, il n’y a pas eu d’intervention à faire donc la charge de travail en a été réduite d’autant.

A l’arrivée en Italie depuis Nice, une belle opportunité de recharger au solaire tout en profitant de se baigner et de savourer la gastronomie du lieu.

Orienter les modules permet d’augmenter la puissance entrante, toujours intéressant.

Quelques dinosaures dans leurs cercueils roulants n’ont pas encore compris que risquer plusieurs vies dont la leur pour grapiller 10 secondes n’en vaut pas la peine, mais en général l’accueil sur la route est très bon avec beaucoup de pouces levés, de questions lors des arrêts. Les vélos solaires interpellent toutes les générations.

Un avantage indirect de l’attention portée à nos montures est de permettre un accès à des endroits incroyables, dans un échange mutuel gratifiant. Chacun montre à l’autre les particularités uniques de son projet. Ici, c’est la Venaria Reale de Turin que l’on visite. En échange, nous leur avons expliqué les particularités du voyage en autonomie énergétique.

Les jardins sont magnifiques

La grande salle est au-delà de ce que l’on peut montrer en images, c’est à vivre en personne.

C’est l’Italie, donc… Bonne nourriture.

Repartis en direction de l’Allemagne, c’est la remontée vers l’Autriche pour le moment.

Dernière étape sur sol italien, un lieu magnifique dont je n’ai pas retenu le nom.

La voie cyclable loin du trafic est agréable, et quelques passages bucoliques forcent à ralentir et profiter de l’instant.

La partie roulante est une autoroute à vélos. Fantastique pour avaler des kilomètres en toute sécurité.

Au pied du Stelvio, à Bormio. L’heure de remonter les batteries autant que possible avant d’affronter le géant, et bien entendu de manger pour recharger ses propres batteries.

Au final, avec assez de soleil le Stelvio est bien plus facile que prévu. D’autres ont eu des avis très différents, mais mon attelage est conçu pour cela.

En largement moins d’une heure, la route de Bormio au col est avalée, c’est positivement impressionnant. Là encore, pas la moindre limite de température ou réduction de puissance. Tout a fonctionné à merveille.

En guise de récompense je me suis gardé une petite douceur pour le Stelvio. Il est temps de profiter…

De retour presque en plaine, de nouveau sur des routes à vélos séparées du trafic.

C’est un réel avantage et une incitation au voyage à vélo. Tellement plus reposant que de foncer sur l’autoroute.

Arrivée en Allemagne. Totalement différent de l’Italie, assurément.

Le nom en a fait rire plus d’un…

Un authentique bouchon de vélos solaire, une première probablement !

La fête des fontaines à Garmisch-Partenkirchen; une occasion de faire la fête en habits traditionnels. Et une belle découverte pour nous.

Avec probablement quelques bières à leur actif et une rentrée tardive, les voyageurs ont le ronflement facile. Les dortoirs ne sont plus une place pour dormir, donc retour dans la remorque pour un sommeil de qualité. Pratique d’avoir cette solution sous la main. La lampe gonflable au plafond est une merveille, tellement pratique d’avoir une lumière globale et réglable au plafond.

Le parc vélo avec la trentaine de machines, et une palette réjouissante de solutions techniques, de choix de véhicules, de géométries.

La consommation de 7.9 Wh/km représente l’équivalent de 0.08 L/100 en essence et 0.067 L/100 de diesel. Oui, environ un facteur 70 par rapport à une voiture et 100 par rapport à un camper. De plus, la production solaire peut totalement compenser cela.

Encore des valeurs de récupération complètement dingues. Un bonheur.

Le tout sans se traîner: presque 64 km/h en pointe, environ 25 km/h de moyenne.

En 7h36 de route c’est donc 187 km qui ont été parcourus.

Ce genre de paysage donne envie de rouler. On a juste envie que ça ne s’arrête jamais.

Une portion séparée du trafic, revêtement plutôt gravel mais bien quand même malgré le fait de consommer plus.

Toujours en environnement protégé, incroyable d’avoir une telle autoroute à vélo.

Parfois la route est comme une symphonie…

De retour sur route ouverte, mais il doit y avoir un grand axe de circulation proche; trafic quasi exclusivement local, revêtement peu endommagé malgré les années. C’est calme et génial à vivre.

Les ondulations des routes de montagne avec les traversées de villages pittoresques, c’est une belle partie de ce voyage. A plus de 140 km du départ du matin, il est temps de prendre une pause de mi-journée. La descente emmène vers le ruisseau pour aller y chercher un endroit de pause, histoire aussi de profiter au mieux du maximum solaire. Nous, à l’ombre. Les vélos, orientés et en plein soleil.

Voilà à quoi cela ressemble, pour une pause repas + sieste de 2h30 à 3h, histoire de laisser passer les heures les plus fortes.

Pas question de se laisser aller dans l’intervalle, non plus.

Grâce au repos de midi qui a bien rechargé les batteries, c’est au final à Landquart que l’on termine la journée, sans fatigue particulière et sans aucune douleur. Toujours aussi génial, le confort offert par ces machines.

Le camping avec vue directe sur la paroi rocheuse est sympathique, et le restaurant du tennis club attenant a été très accueillant.

Voilà, une belle journée qui nous rapproche d’Andermatt plus rapidement que prévu, c’est confortable pour la suite.

Avec une remorque de camping derrière, c’est assez fou. Plus de 55 km/h en pointe, presque 29 de moyenne sur la journée, moins de 8h roulées donc du temps pour faire d’autres choses.

Voici la vue depuis la remorque, c’est plaisant d’avoir cela au réveil.

étape Landquart-Andermatt, là c’est du sérieux. 112 km et 2200 m de dénivelé positif, il y a de quoi faire.

Rien à redire sur la place laissée aux vélos, vu le faible trafic. Et les paysages sont ici encore fabuleux.

Avant le mur de l’Oberalp, petite pause repas, histoire de reprendre des forces.

Les véhicules en recharge durant le repas

Et voilà, le fameux Oberalp.

Au camping d’Andermatt, un assemblage qui ne faisait pas partie du Suntrip mais qui y était en raison d’un projet parallèle, aussi en vélo solaire.

Moment d’échange avec la population dans le nouveau Andermatt, en construction.

Une classe a fait le déplacement pour découvrir les engins.

Sur la descente, le légendaire Hôtel Belvedere qui n’a pas survécu aux changements d’habitudes des voyageurs ces dernières décennies. Fermeture définitive en 2015 après 20 années tumultueuses, la gloire ayant eu lieu au début du 20e siècle.

Sans le glacier comme attraction touristique et sans le besoin de stopper fréquemment, ce lieu n’avait plus de raison d’être.

Beaucoup plus loin, après avoir fait toute la vallée du Rhône et remonté le flanc de la chaîne alpine, on arrive à ce village dont le nom des habitantes laisser rêveur.

La dégradation météo est pour le moins impressionnante. Canicule à Sion, tempête aux Saisies. Tous les participants d’ont pas pu ou voulu faire le chemin, c’était franchement extrême sur les 10-15 derniers kilomètres.

Le réconfort de la tartiflette.

Les derniers kilomètres pour rejoindre mes pénates, c’est la fin de ce voyage.

De manière maintenant connue, reste à gérer le contre-coup suite à la baisse brutale d’activité avec le retour à la normale, absorber la fatigue accumulée, permettre aux muscles de se relaxer un peu et accepter 2 à 3 semaines de réveils étranges.

On se prend à pédaler durant le sommeil; il y a des moments de perte de repères au réveil, le GPS à la main et la question récurrente: « quel est le parcours aujourd’hui? » qui prêtent à sourire.

C’est aussi ce qui fait le charme d’une telle aventure : cela ne s’arrête pas lorsque l’on quitte les autres participants mais dure encore de nombreuses manières après le jour de l’arrivée.